San Giorio
Saint-Georges, Sanjors

23 avril

San Giorio
Saint-Georges, Sanjors

23 avril

San Giorio
Saint-Georges, Sanjors

23 avril

San Giorio
Saint-Georges, Sanjors

23 avril

L’élimination du feudataire, la Fête au château et la Girunda

 

Saint-Georges, martyr  – San Giors – La Féta ‘d Sanjors conclut à la fin du printemps le cycle des fêtes patronales du Val de Suse qui plongent leurs racines dans d’anciens rites dédiés à la fertilité de la terre. Le dimanche le plus proche du 23 avril, la procession religieuse s’accompagne de la figure des six Spadonari qui, avec leur danse des épées, accompagnent la statue de Saint-Georges en procession à travers le village au son de la fanfare. Dans l’esprit de cette tradition renouvelée, c’est l’élimination du feudataire qui est devenue aujourd’hui l’occasion pour la communauté de célébrer une reconstitution historique légendaire en l’honneur de Saint-Georges. L’après-midi, une procession colorée gravit, au son des tambours des Spadonari et des marches joyeuses de la fanfare, les pentes du château médiéval qui domine le village de San Giorio et devient le décor pittoresque où, depuis 1929, se déroule la Fête au château. Inspiré d’un événement historique du Moyen-Âge, le scénario écrit par le curé Don Attilio Bar, auquel quelques chants ont été ajoutés par la suite, raconte l’histoire d’un peuple de paysans harcelés par un châtelain local tyrannique qui leur imposait des impôts et des tourments. L’ultime tentative du despote d’exercer abusivement son « ius primae noctis » déclencha la rébellion des petites gens qui, dans un heureux épilogue, vit la liberté triompher au nom du patron Saint-Georges.
La reconstitution met en scène une centaine de figurants en costume d’époque et mêle aux danses et aux chants traditionnels, les personnages des Spadonari qui jouent le rôle de l’armée du comte et dont la danse des épées devient un exercice d’habileté militaire. La fête s’achève par une danse effrénée, la Girunda, sur la place de la ville, à laquelle participent les figurants et le public.

La fête:
Saint Georges martyr
23 avril

Caractéristiques

  • la Féta ‘d Sanjors
    Nom dans une langue minoritaire
  • Spadonari , fanfare, mariés, comte, Sabrou (épée) et Drapò (drapeau)
    Rôles et objets rituels
  • Spadonari et figurants de la fête au château
    Costume traditionnel
  • Danse des épées
    Danse traditionnelle
  • Canestrelli
    Aliments consommés pendant la fête

Reconstitutions historiques

Dans l’esprit de cette tradition renouvelée, c’est l’élimination du feudataire qui est devenue aujourd’hui l’occasion pour la communauté de célébrer une reconstitution historique légendaire en l’honneur de Saint-Georges.

Les éléments de la fête

 

L’élimination du feudataire
Les Spadonari

L’élimination du feudataire

Les figurants peuvent être classés en deux catégories : la noblesse et la population paysanne, avec quelques rôles clés:
Le comte Raimondo Bertrandi: un feudataire autoritaire et un tyran menaçant et autoritaire avec ses sujets. Il est aidé dans ses entreprises malfaisantes par son fidèle héraut.
La comtesse Speranza: épouse du comte, soumise et effrayée par les crises de colère de son mari, elle aide secrètement la population harcelée par les exigences du comte. Elle est soutenue dans ses actions caritatives par ses demoiselles d’honneur.
La mariée et les bergères : elles interprètent des chants et des danses qui louent le retour du printemps et la joie de l’amour, compte tenu de l’imminence du mariage. Elles tentent de défendre la mariée contre les menaces du tyran et se soulèvent ensuite avec les paysans dans la lutte contre le feudataire.
Le mari et les paysans: le jeune homme amoureux et intolérant aux prétentions du comte appelle la population à la révolte après l’enlèvement de sa promise. Il engage un duel à l’épée contre le comte jusqu’à ce qu’il le tue et libère sa promise.
Le choix des rôles principaux, en particulier celui du marié et de la mariée, qui sont les protagonistes de l’histoire, est lié à leurs compétences en matière de chant et d’interprétation, en particulier pour le duo.
Le rôle du comte a toujours été lié au physique de l’acteur et, bien sûr, à son talent de comédien.

 

Les Spadonari

AVANT LA FÊTE AU CHÂTEAU La danse des épées a des origines très anciennes. Des preuves photographiques et des souvenirs recueillis par le passé évoquent différents rites pratiqués autour du jour de la Saint-Georges. Une cérémonie réservée à un petit nombre, le réveil à l’aube par une fanfare jouant la marche de Diane, les Spadonari se réunissant à Pra Paravi, près d’un cerisier en fleurs, où se déroule un combat au cours duquel le Spadonaro le plus âgé tombe transpercé par le sabre du plus jeune. Une gorgée de vin et le sang d’un coq éclaboussant son visage ressuscitent le vieux Spadonaro, et finalement tous ensemble, Spadonari et fanfare, retournent au village, allant de cour en cour pour rappeler la communauté à la fête religieuse dans l’église. Jusqu’à la fin du XIXe siècle et avant la Première Guerre mondiale, la procession du Cantel, c’est-à-dire l’arbre fleuri ou l’arbre de vie, était encore en usage. Avec ses nœuds colorés et ses fleurs, elle rappelait, comme la figure des Spadonari, une tradition liée aux rites de l’éveil printanier et de la fertilité des champs. Le Cantel était soutenu par la Mignona, la jeune prieure, accompagnée de ses marraines, qui, selon l’unique source orale recueillie vers 1970, étaient la plus âgée des anciennes prieures et la prieure de l’année précédente. Selon une reconstitution photographique, le Cantel et les prieures suivaient les Spadonari, tandis que la procession religieuse portant la statue de Saint-Georges était placée à l’arrière. En outre, des hommes munis de longues lances et de lanternes étaient présents pour escorter l’ensemble du cortège.
Selon toute vraisemblance, la figure des Spadonari a disparu des célébrations religieuses à la suite des événements belliqueux de la Première Guerre mondiale, mais elle a été rétablie lorsque, à partir de 1929, l’élimination du feudataire, familièrement connue sous le nom de Festa al Castello, a été incluse dans les festivités patronales. En effet, la documentation historique montre, durant les premières éditions, des figurants portant des vêtements de différents styles médiévaux que nous savons être des costumes de théâtre loués à Turin.
Les Spadonari, quant à eux, ont fait l’objet d’une intervention du gouvernement à l’époque fasciste, avec l’invention des uniformes à pantalon blanc et tunique rayée rouge et blanche qui ont été utilisés jusqu’à la fin des années 1990. Le chapeau à bord large était décoré de quelques fausses fleurs et de quelques rubans colorés, seul signe de la tradition séculaire précédente.
La tradition des Spadonari est généralement familiale, le rôle se transmettant de père en fils ou en tout cas au sein du cercle familial proche, mais cette tendance est aujourd’hui plus nuancée que par le passé.
La danse des Spadonari, comme toutes les autres de la tradition alpine, n’est pas un exercice militaire d’adresse avec des épées, mais une danse chorégraphiée, en l’occurrence une danse frontale.
Bien qu’exécutés sur les marches interprétées par la fanfare, les mouvements et les gestes sont en réalité rythmés par le roulement des tambours et le commandement du « chef des Spadonari », des ordres impartis en patois qui déterminent les figures exécutées en simultané :
Quat faciade: disposés sur deux rangs et en position frontale, les Spadonari fendent le sol deux fois avec le sabrou, soit quatre fois au total, tout en pivotant de 90°. Chaque fois qu’ils terminent de fendre le sol, ils se retrouvent ainsi alignés sur deux rangs dans la même direction et effectuent un mouvement d’épée vers le haut et vers l’extérieur. Saisissant l’épée à deux mains et la balançant derrière le dos, ils font un pas en arrière en pliant le genou et en faisant en sorte que la pointe de l’épée touche, en le croisant, le talon du pied relevé.
Cercle: disposés en cercle face vers le centre, ils exécutent des mouvements bati sautand trois par trois et bati sautand tuti ansema, c’est-à-dire que les Spadonari se déplacent alternativement ou tous ensemble d’un bond sur un pied vers le centre en frappant leurs épées vers le haut et reviennent à leur place en tournant sur eux-mêmes et en mettant leur épée de côté jusqu’à atteindre la position de repos, le bras gauche sur le côté et la main droite brandissant l’épée vers le haut.
En trois steila pour trois et ansema : disposés en cercle, face vers le centre, le cercle se ferme sur lui-même et les Spadonari tournent sur eux-mêmes jusqu’à ce se retrouver dos-à-dos, l’épée en avant, les bras tendus. Ils se retournent ensuite à nouveau pour revenir face vers le centre du cercle. Avec aut en mes, les six épées sont croisées en haut, avec une moitié croisée au milieu à hauteur des hanches puis le geste de percer le sol est exécuté au même endroit. Avec le suta al bras, la lame est coincée sous le bras, la poignée vers l’avant ; avec un saut en avant, tout le monde se penche avec la tête vers le centre et les lames des épées pointent vers le haut. On revient à sa place avec des sauts marqués, les genoux bien relevés.
Trois an rablan: trois Spadonari font tourner leur épée et se mettent à genoux vers le centre, l’épée pointant vers le haut et la poignée au sol, tandis que les trois autres épéistes croisent leurs lames au-dessus de leurs camarades.
En trois steila la hola (signe des temps qui changent et se rénovent avec une nouvelle terminologie): en cercle face vers le centre, l’un après l’autre, les épéistes tournent sur eux-mêmes et font tourner leurs épées jusqu’à ce qu’ils referment le cercle épaule contre épaule, en pointant l’épée vers l’extérieur, la poignée reposant sur leur côté.
Cambiè sabrou: il s’agit d’une figure qui s’exécute à la fois en cercle et de face. Dans le premier cas, les Spadonari lancent trois fois l’épée vers leur droite, dans le second ils sont disposés en deux rangées face à face.
Lorsqu’ils avancent, les Spadonari marchent au rythme de la musique de la fanfare, la poignée est tenue contre la hanche droite, la lame vers le haut, tandis que le bras gauche est plié à quatre-vingt-dix degrés sur la hanche et est maintenu même lorsque, avec un fè girè, les épées sont lancées en l’air et rattrapées au vol.
Ce sont les commandements que l’on entend lorsqu’on assiste aux mouvements précis des Spadonari qui sautent, font tourner leurs épées, les échangent et miment des gestes comme la fente du sol et la fauche, rappelant qu’il s’agissait de danses propitiatoires destinées à assurer la fertilité de la terre, la fin de l’hiver et de bonnes augures pour le printemps.

 

 

 

Sabrou

 

 

C’est le nom en patois de l’épée à lame de 80 cm de long et de 5 cm de large environ, sans fourreau et à pointe arrondie inoffensive. Elle est dotée d’un pommeau plaqué en laiton et d’un manche en bois recouvert de velours rouge et de clous métalliques, avec une garde incurvée.

 

 

Drapò

 

Il s’agit d’un grand drapeau à fond rouge foncé avec un cadre représentant Saint-Georges terrassant le dragon. Il est porté en procession par le personnage incarnant le gonfalonier et fait l’objet d’un serment dans les scènes finales de l’élimination du feudataire, mais il était probablement déjà présent dans la procession religieuse précédant la Festa al Castello dans une forme similaire où le saint patron est cependant brodé et décoré de passementeries. L’ancien drapeau est conservé à l’hôtel de ville dans une châsse.

La procession en l’honneur de Saint-Georges martyr et la messe

La célébration religieuse a lieu le matin avec le rassemblement à l’école de musique de la fanfare, des Spadonari et des principales figures de la Fête au château. Marchant au son de la fanfare et des tambours, le cortège rejoint l’église paroissiale de Saint-Georges martyr, d’où démarre la procession religieuse.
La statue de Saint-Georges est portée par les conscrits de l’année, âgés de dix-huit ans, et par les fidèles qui se proposent de prendre le relais le long du parcours. Elle est précédée dans l’ordre par les Spadonari, la fanfare, le curé avec la châsse contenant les reliques du saint patron, suivi des fidèles chantant l’hymne à Saint-Georges, des mariés tenant la corbeille contenant le pain de la charité, et des principaux figurants de la Fête au château. La procession dans les rues du village suit le même itinéraire. Elle part de la place de l’église en et passe par la Via della Parrocchia, la Via Carlo Carli dans le quartier appelé Pounta’d Villa, jusqu’à la même rue mais dans le quartier du village appelé Found ‘d Villa, avant de traverser la place devant la mairie et de revenir à l’église pour la messe solennelle.
À la fin de la cérémonie religieuse, le pain de la charité est distribué à l’extérieur de l’église, tandis que les figurants se rassemblent dans la chapelle du comte, située à proximité. Ensuite, le cortège constitué des Spadonari, de la fanfare et des figurants se reforme pour rejoindre la Piazza Velino où les Spadonari exécutent la danse des épées.
La célébration du matin se termine par un apéritif et un déjeuner festif à domicile avec les invités des familles, jusqu’au rassemblement de l’après-midi à l’école de musique d’où repart le cortège des figurants de l’élimination du feudataire.

après-midi

Fête au château – Élimination du feudataire

L’histoire est celle d’un seigneur féodal, Raimondo Bertrandi – membre d’une famille qui a réellement dominé le territoire entre le XIe et le XIIe siècle et inféodée à la famille de Savoie – qui tourmente la population paysanne avec des taxes et des contraintes ; il est accompagné de la comtesse qui, quant à elle, fait de son mieux pour aider les familles. Les Spadonari jouent le rôle de l’armée du comte perfide : le château médiéval rend sans aucun doute la danse des épées encore plus pittoresque.Les paysans supportent de moins en moins l’arrogance du comte, en particulier un jeune marié qui réagit au énième abus de pouvoir par l’exercice du jus primae noctis (droit de cuissage) à l’encontre de sa promise. (un droit médiéval inexistant, mais issu de l’imaginaire historicisé de certaines croyances érudites.)
La jeune mariée et ses compagnes les bergères interprètent des chants et des danses qui vantent la beauté du printemps et l’amour, une idylle interrompue par les menaces du comte, jusqu’à son enlèvement qui déclenche la révolte.
L’épilogue portera en triomphe le marié dans les rues du village mais dans l’ordre inverse : Les Spadonari et la fanfare précèdent le marié porté en triomphe sur les épaules, suivi par les paysans et les bergères, le comte et la noblesse ferment le cortège. Le festival se termine par la Danza degli Spadonari (Danse des épées) et par une danse effrénée sur la place à laquelle participent tous les participants et le public.

Lieux de la fête:
– Église paroissiale Saint-Georges Martyr
– via della Parrocchia, via Carlo Carli
– Place Giordano Velino
– Château médiéval

La tenue traditionnelle des Spadonari

Après le retour des Spadonari à la fête patronale de Saint-Georges, leur tenue comprenait pendant longtemps des pantalons blancs et des vestes blanches avec de longues bandes de ruban rouge se terminant par un nœud. Cet uniforme, imposé de facto aux Spadonari de Fenestrelle, a été utilisé pour la première fois lors de la participation des Spadonari au défilé d’ouverture des Jeux Olympiques de Berlin en 1936.
Grâce à la découverte fortuite d’un costume original des Spadonari, clairement reconnaissable sur les photographies de la fin du XIXe siècle, et à sa restauration, le Gruppo Folkloristico, le comité organisateur de la Fête au château, a pu reconstituer l’uniforme des Spadonari selon l’ancien modèle. Il s’agit d’une restauration réalisée avec des tissus précieux et des garnitures qui renvoient à la tradition, mais qui n’ont certainement pas la richesse que pouvaient avoir les vêtements originaux.
Le personnage du Spadonaro respectait une tradition familiale selon laquelle le rôle se transmettait de père en fils. Le sabrou et le costume étaient également personnalisés et certainement élaborés, arrangés et enrichis au sein même de la famille en utilisant des passementeries, des ornements en or ou en argent et des étoffes en fonction de la disponibilité. Cela signifie que si chaque costume était différent en termes de couleur et d’ornements, le modèle restait le même, une tunique à laquelle était cousue une jupe en tissu plus léger.
Aujourd’hui, la tunique à manches longues en tissu épais de couleur vive est ornée de bordures colorées assorties dessinant des motifs sur les épaules et les poignets. Des franges incrustées plus ou moins longues ornent la poitrine et le dos, et la décoration de l’ancien costume restauré est remarquable, avec un réseau complexe de fils de soie et de billes de bois décorées de soie bleue. En dessous, une simple chemise blanche est portée avec une cravate d’une couleur assortie à la couleur prédominante de la tunique.
La jupe cousue à la tunique est d’une teinte uniforme avec des pois légers qui reprennent la couleur du damas et des bordures, sous lesquelles est enfilé un pantalon classique.
La restauration de 2000 voulait rappeler symboliquement la tradition selon laquelle la formation des Spadonari se composaient de trois personnages provenant des hameaux de montagne, en pantalon noir, et de trois provenant de la « villa », c’est-à-dire du village de San Giorio, en pantalon blanc.
Aujourd’hui, le couvre-chef est un chapeau Borsalino décoré de fleurs et de rubans colorés assortis à la cravate. Il est intéressant d’observer que, sur les photographies de la fin du XIXe siècle, les coiffes sont de styles très différents, ce qui témoigne également de la réutilisation de ce qui était disponible dans la famille. Par ailleurs, dans un cas, un casque de style médiéval est également clairement visible.

Le costume traditionnel des figurants – Élimination du feudataire

Si, au début, des costumes de théâtre étaient loués pour les rôles principaux, les familles ont ensuite travaillé à la confection de leurs propres costumes pour les différents participants, jusqu’à ce que le comité d’organisation, dans les années 1970, fasse réaliser des costumes qui sont encore prêtés aux participants aujourd’hui. Le style est folklorique et restauré dans un style médiéval.
De nombreux participants parmi les paysans et les bergères portent des costumes personnels, dont beaucoup ont été réalisés à partir d’images des premières éditions de la Festa al Castello.

Les Spadonari et Saint-Georges

La danse des épées de San Giorio, et celles du Val de Suse en général, remontent aux danses frontales qui comprennent des figures et des mouvements réalisés simultanément par les Spadonari.

« exercice de trente jeunes s’affairant avec beaucoup d’habilité avec des espadons » Suse, 1663, cortège nuptial du mariage entre Charles Emmanuel II et Françoise d’Orléans (lecture critique d’Ettore Patria).

« une danse exécutée par de jeunes gens l’épée à la main, qui est conservée dans le hameau de Pont de Cervière », 1804 Antoine Farnaud, inauguration de l’obélisque de Montgenèvre

trés longue épée plate que l’on peut saisir à deux mains par la poignée, 1816 Aubin Louis Millin décrit des processions religieuses de villageois habillés en Romains ou similaires

Il s’agit des quelques écrits retrouvés et étudiés jusqu’à présent, mais certains sont intéressants et, bien qu’il ne soit pas possible de savoir à quels villages ils se réfèrent (à l’exception de Pont de Cervières, près de Briançon), ils semblent exclure les danses maures et les danses en chaîne que l’on rencontre dans différentes régions de la Méditerranée ainsi que dans les Alpes.

Différences entre les trois types de danse avec épée:

danses frontales : le nombre de danseurs est pair, ils exécutent des danses rythmées par un tambour et l’accompagnement éventuel de la fanfare n’est pas forcément synchronisé avec les mouvements chorégraphiques.

danses en chaîne : il n’est jamais fait mention de duels frontaux, mais elle est composée de mouvements complexes dans lesquels les Spadonari sont en nombre impair et tiennent l’épée d’une main, tandis que l’autre est posée sur l’épaule du danseur qui précède. La continuité des mouvements entraîne la formation de figures en forme de rose ou d’étoile et se termine par le soulèvement du danseur principal. Les figures chorégraphiques sont accompagnées de musique ou d’une mélodie chantée répétitive.

Les danses maures : ou morris dance, sont des combats explicites, entrecoupés de moments de danse entre deux troupes armées, qui se distinguent souvent par des costumes de couleurs différentes et de style oriental. Dans de nombreux cas, l’une des troupes ou un des danseurs présente un visage noirci. Les spécialistes s’accordent à dire que les affrontements entre chrétiens et sarrasins sont évoqués dans de nombreuses traditions, une série d’interprétations historiques le plus souvent fantaisistes et sans fondement, mais qui ont probablement remplacé des racines plus anciennes. Les personnages au visage noirci représentent des démons végétaux qui ne veulent pas être reconnus par les mauvais esprits et qui déclenchent à un moment précis un rituel de mise à mort et de résurrection. Ce mécanisme est également celui des carnavals d’hiver des Alpes et du Val de Suse comme le Barbuire du Lajetto ou le Gueinì de Salbertrand.

Une tentative qui a également été entreprise dans une certaine mesure pour les Spadonari de San Giorio avec l’invention de l’Élimination du feudataire, mais qui a été supprimée il y a longtemps pour revenir aux racines les plus anciennes.

Le témoignage de Settimia Berardi, née en 1884, recueilli par son neveu Mario Cavargna dans les années 1970, a permis de reconstituer la nature des Spadonari et des trois jours de fête, qui ne comportaient aucun rite religieux.

Lorsque les Spadonari réintègrent la sphère religieuse, ils sont accompagnés par des personnages tels que la Mignona, la prieure célibataire, l’Abbé, le chef de la procession religieuse, et l’Abbesse, la prieure la plus âgée ; tous ces rôles, et celui du Spadonaro le plus âgé sacrifié à Parà Paravì, seront plus tard transférés dans le scénario de l’Élimination du feudataire, comme la jeune mariée, l’époux triomphant, la gentille comtesse et le terrible feudataire. Des interprétations et de nouvelles traditions qui s’enracinent volontairement dans une communauté, peut-être parce que certains rituels et gestes ne sont plus compris.


Il ne fait aucun doute que les interruptions en temps de guerre et le manque de transmission des connaissances aux générations qui sont tombées pendant le conflit ont conduit nécessairement à la création de nouvelles traditions et à une revitalisation, parce que la communauté avait effectivement changé. En ce sens, l’élimination du feudataire s’est imposée et est devenue le nouvel élément traditionnel et identitaire des habitants de San Giorio, tout en sachant que les Spadonari étaient quelque chose d’encore plus ancien.

Il est établi que la danse des épées de San Giorio est, comme les autres danses du Val de Suse, l’expression de rituels ancestraux liés à la renaissance du printemps après le long hiver. Une période de repos pour les communautés alpines qui trouvent dans ces rites l’essence d’une communauté dont le réveil est symboliquement marqué par des moments et des figures choisis.

Mais le thème du passage de l’hiver à l’éveil printanier, de l’obscurité à la lumière, aux fleurs et aux couleurs se retrouve également lié au culte de Saint-Georges martyr et unit curieusement les cultes locaux présents dans les trois religions monothéistes de la Méditerranée par un fil rouge très intéressant.
Un culte qui est arrivé dans les Alpes et qui a trouvé une expression symbolique ici à San Giorio avec les Spadonari et la Danse des épées.
Selon des études récentes, Saint-Georges pourrait être identifié à une sorte d’ancien protecteur célébré entre le 23 avril (jour de sa mort) et le 6 mai, selon le calendrier. Dans différentes régions de la Méditerranée, il existe des moments de rassemblement où l’on mange et où l’on entre en contact avec la nature en cueillant des fleurs sauvages ou en accrochant des boucles colorées sur les arbres, tout en priant pour la fertilité de la terre ou de la famille. Il existe des sanctuaires « ambigus» dédiés à Saint-Georges qui sont revendiqués ou fréquentés par des chrétiens et des musulmans, car ces figures sacrées transcendent les appartenances religieuses et sociales et rappellent des rites plus anciens.

La légende du dragon tué par Saint-Georges, où le dragon représenta le mal et le diable selon la légende portée en Occident par les chevaliers de Jérusalem dont il était le saint patron, trouve son origine à Lydda en Palestine (où se trouve la tombe du saint) où la communauté locale voue un culte au prophète coranique Al-Khadr, le prophète vert, qui a libéré l’étang d’un monstre qui empêchait les animaux et la communauté de s’abreuver. En d’autres termes, Saint-Georges, comme Al-Khadr, est le printemps tandis que le dragon/monstre est l’hiver qui dévore le bétail et les jeunes. Le prophète vert est lié à la végétation et à la fertilité et est célébré le 23 avril. On ne peut faire autrement que d’observer la similitude avec Saint-Georges, si l’on pense qu’en Turquie également, le sanctuaire qui lui est dédié sur l’île de Buyukada est partagé entre chrétiens orthodoxes, catholiques musulmans et alévites le 6 mai. En Turquie et dans la péninsule ibérique également, le jour de la Saint-Georges, le Gurgevdan ou Hidrellez (du prophète Élie, porteur de lumière et de soleil) revient, avec des rites très similaires liés à l’eau, à la fertilité symbolisée par des fleurs et des étoiles colorées.
L’étymologie du nom Georges renvoie, quant à elle, au sens grec d’agriculteur, de celui qui cultive et entretient la terre, à titre de référence supplémentaire à l’origine du culte du saint.

La lumière du printemps qui remplace les ténèbres de l’hiver, la métaphore du bien du héros qui apporte la lumière et du monstre des ténèbres trouvent leur force dans des légendes qui se perpétuent dans les trois religions monothéistes de la Méditerranée où la terre, l’agriculture et la fertilité ont été des moteurs de la croissance des sociétés.

L’élimination du feudataire

En 1929, le curé Don Attilio Bar a composé le scénario de la légendaire reconstitution historique de l’élimination du feudataire. C’est ainsi qu’un nouvel élément, probablement basé sur des traditions et des interprétations érudites du XIXe siècle qui tendent à être considérées aujourd’hui comme fantaisistes, a intégré la fête patronale. Depuis lors, la « Festa al Castello » fait entrer sur scène toute la communauté, adultes et enfants, pour interpréter des rôles et des personnages et donner le jour à une nouvelle tradition qui se répète depuis 90 ans maintenant, malgré des hauts et des bas. 

Parking:
– piazza A. Micellone – prato del Bourg sur la SS 24 : pour faciliter le passage du cortège processionnel le matin et du cortège des figurants de la Fête au château l’après-midi, le stationnement est généralement interdit sur la piazza Giordano Velino et dans les rues adjacentes.

Lieux de la fête:
• école de musique
• rues du village
• paroisse de Saint-Georges le Martyr
• château médiéval

Horaires:
matin 10h30 – 12h00
après-midi 14h30 – 16h30

Rites alpins Val de Suse

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